S'évanouir, tourner de l'œil… ces pertes de conscience suivies d'un retour rapide et spontané à la normale sont le plus souvent bénignes. Néanmoins, l'origine cardiaque de certaines nécessite une attention particulière. D'où l'intérêt d'un bon diagnostic rendu aujourd'hui possible par de nouveaux dispositifs.

Bien qu'impressionnantes, les syncopes ne sont pas exceptionnelles, puisqu'on estime qu'en France un adulte sur trois est concerné. Le point sur ces troubles et leur diagnostic avec Doctissimo.
Qu’est-ce qu’une syncope ?
La syncope correspond à une perte de connaissance brutale et brève. La cause des syncopes est la privation d'oxygène dans le cerveau résultant d'une brutale réduction du débit sanguin dans les artères cérébrales, elle est associée à une chute de la tension artérielle et à un affaiblissement voire une disparition du pouls.
Le plus souvent, le retour à un état de conscience normal est spontané, rapide et complet. Mais les conséquences physiques et psychologiques de ces troubles sont loin d'être anodines. Dans 30 à 40 % des cas, des traumatismes résultent de ces pertes de connaissance : fractures, plaies, contusions, accidents de la voie publique... Au niveau de la qualité de vie, 73 % des personnes concernées montrent des signes d'anxiété ou de dépression alors que 71 % notent une altération des activités quotidiennes (réduction de la conduite automobile pour 60 %, modification de l'activité professionnelle pour 37 %) 1.
En fonction de son origine et du risque de récidive, la gravité de la syncope peut être associée à un risque de mort subite. Il est donc capital de ne pas négliger ces malaises, de bien en identifier la cause afin d'éviter toute conséquence fatale.
Qui est touché ?
"Cette maladie concerne toutes les tranches d'âge de l'enfant à la personne âgée. Mais on constate toutefois un risque plus important avec l'âge", précise le Dr Claude Kouakam, cardiologue rythmologue au CHRU de Lille. Son risque de survenue passe ainsi de 0,7 % chez l'homme de 35 à 44 ans à 5,6 % après 75 ans 2. Si elles sont bénignes la plupart, elles doivent être contrôlées par un médecin, particulièrement chez certaines personnes :
- Les personnes âgées ;
- Celles ayant déjà souffert de syncope ;
- Celles ayant de l'hypertension ;
- Les diabétiques ;
- Les femmes enceintes.
Quels sont les symptômes annonciateurs d'une syncope ?
Ils peuvent varier d'une personne à l'autre mais le plus souvent on retrouve :
- Une sensation de malaise ;
- Une vision trouble ou voile visuel ;
- Des vertiges, suées…
Quelles sont les causes ?
Les origines sous-jacentes de la syncope sont diverses : causes cardiaques, causes vasculaires, causes réflexes. De plus, certaines pertes de connaissance transitoires peuvent être confondues avec une syncope, elles ont alors des causes neurologiques, ou d'autres pathologies (psychiatrique, métabolique)... Enfin, certaines syncopes restent sans explication.
Quels sont les différents types de syncopes ?
Schématiquement, on distingue trois grands types de syncopes :
- La syncope réflexe désigne une réponse réflexe qui, lorsqu'elle est déclenchée, produit une vasodilatation (élargissement des vaisseaux qui conduit à une réduction du débit sanguin) et/ou une bradycardie (abaissement de la fréquence cardiaque). Les événements déclencheurs diffèrent énormément selon les patients. On distingue ainsi la syncope vasovagale (causée par un stress, la station debout prolongée…), la syncope par hypersensibilité du sinus carotidien (provoquée par certains mouvements de la tête) ou la syncope situationnelle (associée à des scénarios spécifiques comme la miction, la toux…) ;
- L'hypotension orthostatique rassemble les syncopes dans laquelle la position verticale (ou plus généralement le passage de la position assise ou allongée à la position debout) provoque une hypotension artérielle ;
- Les syncopes d'origine cardiaque sont plus préoccupantes, car elle double le risque de décès prématuré. Elles peuvent être dues à des arythmies cardiaques (troubles du rythme cardiaque qui peut diminuer le débit sanguin) ou une cardiopathie (maladie du cœur).
Quels examens pratiquer ?
Dans 30 à 40 % des cas, les syncopes restent inexpliquées. La priorité du médecin est de faire la différence entre syncope d'origine cardiaque et non cardiaque, pour en évaluer le risque. Les premières étant nettement plus inquiétantes. Pour cela, au-delà de l'examen clinique, de l'interrogatoire par le médecin et d'un électrocardiogramme (ECG qui enregistre l'activité électrique du cœur), le médecin peut si le diagnostic reste incertain et en fonction des facteurs de risque (circonstances de survenue, antécédents, ECG anormal…), recourir à d'autres examens 3. Les principaux sont :
- Un Holter ou enregistrement ECG de longue durée sur 48 heures. Mais les syncopes étant par nature peu prévisibles, cet examen se révèle inutile dans la majorité des cas ;
- Un enregistrement externe d'événements cardiaques lorsque des symptômes précurseurs existent ou lorsque des arythmies cardiaques préprogrammées se produisent ;
- Le test d'inclinaison ou Tilt Test pour démontrer l'existence de syncope vasovagale (changement de position). La sensibilité de cet examen reste discutée ;
- Une exploration électrophysiologique endocavitaire qui s'apparente à un électrocardiogramme enregistré depuis l'intérieur du cœur. Des sondes munies d'électrodes permettront d'enregistrer l'activité cardiaque en différents points ou la réaction à une stimulation électrique… cet examen invasif est inutile chez les patients ayant un ECG normal sans cardiopathie ni palpitation ;
- Le moniteur cardiaque implantable est capable d'enregistrer le rythme cardiaque pendant la syncope elle-même et ainsi de diagnostiquer ou d'exclure une arythmie (problème de rythme cardiaque). Pour les syncopes inexpliquées, ce monitoring prolongé offre plus de chances d'établir le bon diagnostic.
Faut-il consulter ?
Une syncope ne doit pas être prise à la légère, si vous reprenez vite connaissance, prenez rendez-vous avec votre médecin rapidement afin de faire un bilan de santé avec lui. "Un patient qui souffre de syncope doit consulter immédiatement son médecin, qui lui fera subir un interrogatoire et des examens cliniques. En effet, la syncope est un problème extrêmement fréquent et de nombreuses personnes ne le savent pas et ne consultent pas. Heureusement, elles sont souvent dues à des causes bénignes. Mais s'il s'agit d'une syncope récidivante, il est indispensable de consulter un médecin généraliste, puis un cardiologue, car presque 3/4 des syncopes récidivantes sont d'origine cardiaque", précise le Dr Kouakam.
Quels sont les risques ?
Les risques viennent essentiellement du contexte de la syncope :
- Si l'on marche ou que l'on est debout, il y a un risque de chute et donc de blessure ;
- Si la syncope survient en conduisant, elle entraîne un risque d’accident de la circulation ;
- Si elle survient en nageant, le risque est alors la noyade.
Comment réagir en cas de syncope ?
- Si vous en êtes souvent victime et que vous la sentez venir, il faut rester calme, s’allonger ou s’accroupir, surélever les jambes, et ne pas se lever si l’on est assis ;
- Si vous êtes témoin d'une syncope, vérifier que la personne respire, mettez-la à l'écart du passage et restez avec elle lorsqu'elle reprend connaissance, si besoin, accompagnez-la chez le médecin. Si elle ne respire pas, appelez les urgences au plus vite et commencez les gestes de premiers secours.
Quelle place pour le moniteur cardiaque implantable ?
Si le recours aux méthodes traditionnelles permet de caractériser la majorité des syncopes, certaines échappent à un diagnostic certain. Cette proportion est même de 50 % chez les patients de plus de 70 ans. Si un problème de rythme cardiaque est suspecté ou face à des syncopes récidivantes inexpliquées, le moniteur cardiaque implantable permet de poser un diagnostic certain et ainsi d'orienter le patient vers une prise en charge adéquate. En France, environ 1 000 patients par an se voient implanter ce type de dispositif.
Un moniteur cardiaque implantable est un dispositif programmable qui surveille continuellement l'électrocardiogramme d'un patient. Il enregistre non seulement des données cardiaques suite à l'activation volontaire par le patient mais aussi des arythmies détectées automatiquement, selon les critères programmés par le médecin.
De la taille d'une clé USB 4, son implantation est simple et peu invasive. L'appareil est placé en sous-cutané lors d'une anesthésie locale, et nécessite une petite incision d'environ 1 cm au niveau de la face antérieure du thorax. Le patient n'a même pas besoin d'être hospitalisé. Sa longévité est de 36 mois.
Fonctionnant sur deux modes, il fait appel à la participation du patient pour déclencher l'appareil et enregistrer les événements ayant précédé la perte de connaissance mais dispose également d'un enregistrement automatique qui capte des épisodes prédéfinis par le médecin sans nécessiter l'intervention du patient. En plus de ce boitier implanté, ce moniteur se compose d'un assistant patient que le patient doit porter avec lui, d'un programmeur qui permet au médecin de régler et d'interroger le boitier à travers la peau. Depuis novembre 2008, ce dispositif offre au clinicien la possibilité d'avoir accès aux données à distance et à tout moment via le système de télésuivi4, le tout sans nécessiter de déplacement pour le patient.
"Concrètement, le patient est vu en consultation tous les 4 mois, pour pouvoir interroger les mémoires du moniteur cardiaque implantable. S'il fait une syncope, le médecin lui demande de venir immédiatement. Certains patients peuvent présenter des anomalies du rythme cardiaque asymptomatiques sans qu'ils ne s'en rendent compte. Des anomalies qui peuvent être très dangereuses pour leur vie. Il est alors important de décider d'une thérapie à suivre le plus tôt possible", précise le Dr Kouakam.
Son efficacité diagnostique 5 et son moindre coût6 (par rapport aux autres stratégies diagnostiques) pourraient offrir demain une plus large place à ce dispositif pour les patients qui présentent des caractéristiques cliniques ou ECG suggérant une syncope arythmique ou ayant des antécédents de syncopes récidivantes. "Actuellement, le dispositif est pris en charge par la Sécurité Sociale, contrairement à l'acte d'implantation pour lequel le médecin ou l'hôpital ne sont pas rémunérés, mais cela devrait être résolu bientôt. Quoi qu'il en soit, le jeu en vaut la chandelle. Il y a d'ailleurs des recommandations très claires de la Haute Autorité de Santé pour permettre des utilisations beaucoup plus larges de ce moniteur cardiaque implantable en France, dans le cadre de syncopes inexpliquées", conclut le Dr Kouakam.
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